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LE MODELAGE DES ELEMENTS DU MOI.

suite, ce Malais revêt toutes sortes de formes terrifiantes dans l’imagination de Quincey. Cette histoire s’explique ainsi : 1° le charme de la servante fixe, dans le moi de Quincey, l’image du Malais, en même temps qu’elle suscite et typifie une foule d’hérédismes du même Quincey ; 2° ces hérédismes, empruntés à des savants, à des navigateurs, à des artisans, à des hommes de pensée et d’action de l’ascendance de Quincey, suivent les saccades d’un instinct génésique, que stimule périodiquement l’usage de l’opium. C’est la période des rêveries pittoresques, où le Malais revêt successivement l’habitude et les allures mentales de tous les ascendants en mouvement de Quincey. 3° L’intoxication, en s’aggravant, engourdit l’instinct génésique, lequel n’accomplissant plus qu’imparfaitement son rôle, parsème et obstrue le moi quinceyen d’ébauches et de débris héréditaires. Il s’ensuit un sentiment douloureux, puis désespéré, de menace, d’effritement et de mort, une prédominance de ces débris automatiques, de ces réflexes de pensée qu’une psychologie défectueuse qualifie d’inconscients. Ce sont les Suspiria de profundis.