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L’HÉRÉDO.

À tous ceux que la question intéresse, je recommande la lecture attentive des Confessions d’un mangeur d’opium de Quincey. Cet auteur est un des plus sincères de tous les pays et de tous les temps. Sa déposition auto-biographique est d’autant plus intéressante qu’il n’a pas du tout conçu le mécanisme que je viens d’indiquer et que l’éveil des hérédismes, sous le fouet de l’instinct génésique, lui est complètement inconnu. L’initium est le désir que lui inspire une petite passante d’Oxford Street, nommée Anne. C’est ce désir, exalté par l’usage de l’opium, qui animera désormais, et pendant des années, les personnages intérieurs, les protagonistes psychiques de l’ascendance de Quincey et les gonflera en une multitude de figures, auxquelles il prêtera les traits des badauds rencontrés par lui à travers la ville de Londres, au cours de sa quête angoissée. Il est encore question, à un moment donné, dans ce livre si impressionnant, d’un Malais errant, accueilli un matin par l’auteur, gratifié d’un pain d’opium, puis renvoyé, le tout en présence d’une jolie et gracieuse servante, dont on note le charme pénétrant, mais sur laquelle on n’insiste pas. Par la