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LES ROMANS ANTI-CLÉRICAUX.

— Est-ce que cet enfant, demanda-t-elle à Mme Cingali, est le fils de Jacques Lablaude, l’ouvrier chaîniste qui travaille chez Bec ?

— Oui, dit Mme Cingali.

Alors Georgette raconta la touchante histoire de Jacques.

Le pauvre homme perdait la vue. Il allait être sans emploi, sans pain.

Georgette peignit d’autant mieux le malheur de Jacques Lablaude qu’elle sentait plus vivement ce que la situation de l’ouvrier congédié avait de poignant et de douloureux.

Cingali, qui, après être monté un instant pour coucher sa petite fille, était descendu et avait écouté la fin de l’anecdote, dit à Georgette :

— Envoyez-nous Jacques Lablaude. Nous l’emploierons ici pour un travail quelconque. Mon commerce prospère assez pour que je puisse faire une bonne action. Un employé de plus ne nous ruinera pas.

— Oh ! vous êtes bon, monsieur, dit Georgette avec des larmes dans les yeux.

— C’est convenu, dit gaiement Cingali. Vous nous envoyez demain votre protégé.

En entendant ces deux mots : « votre protégé, » Georgette pâlit. Elle venait de songer à elle-même.

Elle se dit qu’elle était folle et qu’elle n’allait plus pouvoir, maintenant, entrer chez Cingali.

Demander une place, rien de plus simple… mais en demander deux coup sur coup… ce n’était guère possible !

Par générosité, par l’entraînement d’un bon cœur qui s’oublie et ne pense qu’au bonheur des autres, Georgette venait de se fermer la porte de la maison Cingali.

— Mais vous-même, mademoiselle, que vouliez-vous ? dit Mme Cingali.

— Moi… rien… balbutia la jeune fille en rougissant.

Et Georgette sortit de la boutique en disant à Cingali et à Blanche :

— Merci !