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LES ROMANS ANTI-CLÉRICAUX.

grossesse et Dieu me fera la grâce de m’accorder la santé. Je veux que mon enfant trouve pour se vêtir une layette bien chaude, j’élèverai moi-même mon petit, courageusement, et peut-être me pardonnera-t-il plus tard en raison de mes efforts et de mes veilles, de l’avoir conçu dans la douleur et de n’avoir pu lui donner que mon nom.

Quant au bel Arthur, Georgette ne songeait même pas à s’adresser à lui.

Elle se disait qu’il faudrait qu’elle fût bien misérable, bien dénuée de tout pour aller trouver ce lâche.

La pauvre fille se demandait comment elle avait pu se faire un seul instant illusion sur l’honnêteté de ce cynique, comment peut-être elle l’aimait encore.

Il fallait que l’esprit de vertige se fût emparé d’elle.

Elle avait éprouvé en effet un soir comme une sorte de folie.

Depuis longtemps, Arthur l’attendait à la sortie de l’atelier. Georgette le rencontrait partout.

On eût dit une fatalité. Elle voyait dans ces rencontres une indication providentielle.

Toute petite, Georgette n’avait pas été heureuse. Sa mère, devenue veuve, vendait des légumes dans la rue.

Georgette restait à la maison, soignant un petit frère qu’elle berçait et portait dans ses bras.

Ce frère était mort et il avait semblé à la petite fille de sept ans qu’elle perdait un enfant à elle.

Plus tard, à l’école des sœurs, elle était toujours mal habillée. Sa mère était si pauvre !

Georgette avait une foule d’humiliations. Mal mise et timide, on la trouvait laide. Puis, la mère de Georgette était devenue infirme. On avait vécu de la charité publique.

Un matin, des hommes noirs coiffés de chapeaux cirés recouverts d’un crêpe avaient cloué la vieille femme morte entre quatre planches.

Alors Georgette avait été recueillie par des voisins qui l’avaient mise en apprentissage. Puis, ses protecteurs étaient morts.

La petite était devenue jeune fille.

Elle se sentait trop seule. À dix-huit ans, l’ardeur des premiers baisers du printemps de la vie vous brûle dans vos rêves. Nature aimante