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LES ROMANS ANTI-CLÉRICAUX.

— M. de Maurelent a le délire, dit la comtesse à l’abbé Meurtrillon.

Et elle ajouta :

— J’ai peur… je voudrais qu’il vécût… Oui, Dieu m’est témoin que je sacrifierais toute mon existence pour le sauver… C’est mon devoir d’épouse. Mais ne serait-il pas temps, monsieur l’abbé, de donner au malade les derniers sacrements ?

— J’agirai, madame, selon votre volonté, dit l’abbé Meurtrillon en s’inclinant.

Meurtrillon sortit et se rendit à l’oratoire.

— Décidément, se disait-il, Firulard a raison. Il y a quelque chose. Mme de Maurelent désire que son mari meure. Est-ce pour elle ? Évidemment non. Il faut que cette mort profite à un autre. Mais à qui ? Oh ! je le saurai !

Le prêtre était à la fois étonné et ravi de trouver chez la comtesse cette sorte de complicité mystérieuse.

Il était également très satisfait que M. de Maurelent ne songeât pas à mourir, car la brusque apparition des sacrements de la mort devait être ainsi d’un effet plus terrible.

— En avant, courage, mes amis ! murmurait M. de Maurelent… Frappez la Révolution !… Frappez la louve ! En avant, soldats du Seigneur ! en avant ! La croix sur la poitrine, mes gars, frappez la bête maudite !

L’abbé Meurtrillon revint avec les saintes espèces.

S’approchant du lit du comte, il dit d’une voix lente et forte :

— Maxime de Maurelent, chassez votre rêve. Ce n’est plus le roi de France qui vous appelle : c’est le roi du ciel. Dernier rejeton d’une race de héros, sachez mourir en chrétien. Dieu est présent, et vous allez recevoir l’hostie sainte, le signe rédempteur qui ouvre aux âmes délivrées les portes du paradis.

— Mourir ! dit M. de Maurelent, qui sembla s’éveiller d’un songe et se mit à trembler de tous ses membres. Mourir ! Non, non ! je ne veux pas mourir…

— La mort est derrière le médecin. La mort est derrière le chevalier, dit Meurtrillon gravement.

— Je ne veux pas mourir ! répliqua le vieillard.

— Vous êtes condamné, dit durement Meurtrillon.

Et il ajouta :