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LA RELIGION DU CRIME.

des fortunes. Ces merveilles étaient frottées par des femmes plus pauvres que le grillon des champs.

C’était, d’ailleurs, un spectacle étrange de voir ce grand diable de curé frétiller au milieu de cet atelier de polisseuses. Pourtant, quand l’abbé Sacabre, toujours guidé par Arthur, arriva près de la bossue, il devint grave.

On eût dit qu’on lui avait jeté sur la tête un des seaux d’eau de savon de l’atelier. Pour être homme de Dieu, on n’en est pas moins homme.

Le prêtre n’aime, en général, ni les vieilles femmes, ni les laiderons, ni les bossues. Il les réduit à la portion congrue au tribunal de la pénitence et les évite autant que possible dans toutes les circonstances de la vie, à moins qu’elles ne l’aident à parvenir auprès des femmes jolies et jeunes.

Aimable jetait un froid au bouillant abbé.

— Mademoiselle Aimable, dit Arthur en présentant la bossue à l’abbé Sacabre. Elle se distingue, ajouta-t-il ironiquement, en ce qu’elle a tout au moins le caractère très bien fait. Grande égalité d’humeur. Un petit séraphin femelle.

L’abbé Sacabre ne trouvait rien à dire à la bossue. Il restait planté devant elle.

Aimable le regardait des pieds à la tête, voyant l’effet que son physique ingrat produisait sur l’abbé, et pinçant les lèvres.

Le prêtre comprit qu’une diversion devenait nécessaire.

— Et mademoiselle, que fait-elle ? dit-il en désignant Georgette.

Le bel Arthur ne répondit pas. Son regard venait de rencontrer le regard de Georgette, et ce regard était à la fois terrible et suppliant.

Malgré toute son assurance, Arthur s’était troublé.

— Excusez-moi, monsieur l’abbé, dit-il. J’ai oublié de dire une chose très importante à M. Bec et à l’abbé Meurtrillon. Je monte pour un instant. Dans quelques minutes, je vous rejoins.

— Allez, dit l’abbé.

Arthur disparut.

L’abbé Sacabre, sur qui la vue de la bossue avait fait une impression pénible, fut très frappé de la beauté de Georgette.

Il resta là sans dire un mot, la regardant travailler.

La bossue n’avait pas quitté Georgette des yeux depuis que le bel Arthur s’approchait d’elle.