Pauline Campistron, à qui la politique donnait sur les nerfs, profita de l’incident pour mettre brusquement la conversation sur une autre voie.
— À propos, monsieur Mortier, vous savez que l’appartement de l’entresol est loué ?
— Non… Qu’est-ce que cela peut me faire ?
— On ne sait pas. Placide, en descendant tantôt, a vu sur la porte la plaque du nouveau locataire. Il paraît que c’est une dame, et même une dame qui exerce une profession… tout à fait extravagante.
— Bigre !
Cette exclamation avait été poussée par Campistron et par le président à la fois.
Le colonel sonna Placide.
Placide était son valet de chambre, précédemment son ordonnance, à l’époque où Campistron était en activité. Placide parut.
Raide comme un automate, il salua et dit :
— Qu’y a-t-il au service de mon colonel ?
— Placide, demanda Campistron, ma femme est folle ; elle prétend que depuis aujourd’hui la maison est mal habitée, et qu’il y a, à l’entresol, une locataire exerçant une profession… extravagante.
Placide salua.
— Madame la colonelle n’est pas folle, dit-il. J’ai vu la plaque en cuivre de l’appartement de l’entresol, occupé depuis hier. Cette plaque porte : Mlle Pélagie, culotteuse de pipes.
— Qu’est-ce que cela signifie ? firent le président et Campistron.
Et Mme Mortier ajouta :
— Avez-vous interrogé le concierge, Placide ?
— J’ai interrogé M. Orifice, madame. Il ne sait pas lui-même ce que cela veut dire. Ce n’est pas à une demoiselle qu’il a loué, mais bien à un jeune homme brun, grand, à petite moustache, avec une figure rouge et un long cou, qui a pris un bail de trois-six-neuf et a dit ne pas être marié…
— Pas marié !… Parbleu ! une demoiselle Pélagie, culotteuse de pipes !
— Non, messieurs, non, mesdames… Ce jeune homme a dit formellement n’être marié ni de la main droite ni de la main gauche… Il a déclaré vivre sans père ni mère, sans frère ni sœur, sans enfants ni parents, ni amis d’aucun sexe…
— Mais alors ?