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LA VIE DE JÉSUS

À bout d’avertissements, Hérode donna des ordres sévères.

La police se présenta à Jean-Baptiste :

— Tant que vous vous êtes contenté de flanquer des douches aux gens, fit le chef, on vous a laissé tranquille. Le rapport des pharisiens était que votre tête avait complètement déménagé ; on tolérait vos fantaisies inoffensives. Mais aujourd’hui, vous êtes devenu un fou dangereux. Vous injuriez d’une façon quotidienne le gouvernement. Vous dites prêcher la religion ; or, les hommes de religion déclarent que le respect est dû à l’autorité. Vous êtes par le fait en contradiction avec vous-même ; ce qui prouve que vous êtes plus toqué que jamais. Seulement, comme voilà trop longtemps que cela dure, nous avons l’honneur de vous arrêter.

On s’empara donc de la personne du baptiseur, on saisit son baquet et l’on mit les scellés sur sa hutte.

Après quoi, on l’inséra dans la forteresse de Machéronte, la même où la première femme d’Antipas s’était réfugiée. Seulement l’épouse répudiée y vivait en toute liberté, tandis que Jean-Baptiste y figurait derrière de bonnes grilles et sous de solides verrous.

La position n’était pas gaie, surtout pour un habitant du désert, pour un amateur de larges horizons.

Au lieu de le calmer, cette incarcération le mettait hors de lui, et, quand une hirondelle descendait d’un créneau pour se jeter dans l’espace, Jean-Baptiste, agitant les mains à travers les barreaux de sa fenêtre, lui criait comme un enragé :

— Hirondelle gentille, va dire au roi Hérode qu’il a perdu toute mon estime et que ça lui portera malheur !

CHAPITRE XXIII

LA CONQUÊTE D’UNE SAMARITAINE

Bien que doué de la toute-puissance, le seigneur Jésus n’était pas précisément ce qu’on est convenu d’appeler un homme courageux. Il avait même un certain fond de poltronnerie.

Quand il eut connaissance de l’arrestation de Jean-Baptiste, il se dit que son tour pourrait bien ne pas tarder à venir et il s’empressa de changer de contrée.

L’Évangile, pour pallier le ridicule de cette caponnade, explique que le Christ fut poussé à s’enfuir, non de son propre mouvement, mais « par la vertu du Saint-Esprit. » Voilà encore le pigeon qui s’en mêle. C’est saint Luc qui a trouvé le moyen d’arranger si bien les choses (chap. IV, v. 14).