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LA VIE DE JÉSUS

être dans l’étonnement à l’aspect dans cette riche caravane de monarques orientaux. Ils n’avaient vu magnificence pareille depuis longtemps. Les gamins s’attroupaient dans les rues et contemplaient d’un œil émerveillé les chameaux tout caparaçonnés d’étoffes précieuses.

Les mages prirent un cicerone et se firent conduire auprès du roi. N’ayant pas été prévenus par leurs calculs que le prince nouveau-né ne faisait pas partie de la famille d’Hérode, ils s’attendaient à trouver dans le palais principal de la ville le moutard auquel ils apportaient leurs hommages.

Quelqu’un donc qui fut surpris, ce fut Hérode, quand il entendit ses collègues à couronne, venus des plus lointains pays, lui dire dans la langue juive la plus pure :

— Cher cousin, nous venons vous féliciter de l’heureuse naissance de votre fils.

— Ah bah ! répondit Hérode, mais ma femme ne m’en a pas donné depuis quelque temps.

— Cependant, objecta Melchior, nous sommes mathématiquement sûrs qu’un futur roi des Juifs est né il y a peu de jours par ici. S’il ne fait pas partie de votre progéniture, veuillez du moins avoir la bonté de nous indiquer où nous le trouverons.

— Ça, que me chantez-vous ? interrogea Hérode.

— Une étoile nous est apparue, sire, une étoile mirobolante, une étoile qui marche. Elle nous a conduits jusqu’en ces lieux. Or, quand une étoile se permet de pareilles libertés, ce n’est pas sans un motif, des plus sérieux. Du reste, nous avons la certitude de ce que nous avançons. Nous sommes plongés jusqu’au cou dans la science des astres, et nous ne pouvons que vous répéter notre question : Si le futur roi des Juifs n’est pas chez vous, où perche-t-il ?

Hérode se sentit troublé par l’assurance avec laquelle parlaient ces princes savants. Il se dit in petto que ces nobles inconnus ne s’étaient pas payé l’ennui de faire des milliers de lieues à dos de chameau pour venir le mystifier. Et, comme il ne voyait pas pour l’avenir d’autre roi juif que son héritier présomptif, il éprouva une grande crainte de quelque concurrence mystérieuse.

Néanmoins, en habile homme qu’il était, il sut ne rien laisser paraître du trac qui l’agitait, et ce fut avec le sourire sur les lèvres qu’il répliqua aux mages :

— La nouvelle que vous m’annoncez, chers collègues, est une vraie nouvelle pour moi ; mais elle me comble d’allégresse. Soyez assez aimables pour continuer à suivre votre étoile, et, quand vous aurez trouvé le futur roi des Juifs, repassez à mon palais pour me dire exactement le lieu de sa résidence. Je serai heureux alors d’aller rendre visite à mon tour à cet enfant prédestiné.

— Oh ! ce n’est pas une simple visite que nous allons lui