tége de miracles, qui cependant n’étaient pas pour passer inaperçus ; et voilà pourquoi nous inclinons à penser que des prêtres ont songé, dès le deuxième siècle, à tirer parti de ces légendes, alors à l’état d’embryon, et ont entrevu la possibilité de créer un culte nouveau, alors que le paganisme n’avait plus de croyants, alors qu’on riait publiquement de Jupiter et des dieux de l’Olympe, — les immortelles satires de Lucien de Samosate, vivant à cette époque, sont là pour l’attester.
Oui, une secte chrétienne peut s’être créée dans ces circonstances, s’être répandue, sans que son existence et sa propagation nécessitent la réalité de Jésus-Christ ; et des martyrs de cette idée religieuse, suppliciés sous Domitien, Trajan et autres, ne prouvent rien à cet égard, absolument rien, pas plus que les milliers de martyrs qui se font broyer, même de nos jours encore, sous les roues du char de Djaggernaut, ne prouvent l’existence réelle de Bouddha et de ses incarnations.
Comment peut-on croire raisonnablement que Jésus-Christ a existé, et surtout existé en accomplissant des prodiges extraordinaires, alors que pas un historien, pas un écrivain contemporain n’a parlé de lui, avec ou sans miracles ?
Tacite, qui vécut de 54 à 140, et dont l’histoire abonde en détails de mince importance, a ignoré Jésus-Chris. Suétone (65-135), l’historien minutieux des douze Césars, a ignoré Jésus-Christ. Quintilien, l’illustre rhéteur, né sous Claude, a ignoré Jésus-Christ, lui dont le livre De l’Institution oratoire, un des plus beaux monuments de la littérature latine, passe en revue tous les discoureurs, avocats et sophistes-prêcheurs. Pline l’Ancien, né sous Tibère, mort sous Titus, a été un admirable naturaliste, mêlant à la science de la nature l’agréable récit des faits célèbres de son temps, et il a ignoré Jésus-Christ ; et son neveu, Pline le Jeune, dont les innombrables lettres, alertes et instructives comme celles de Mme de Sévigné, parlent de tout, ne savait rien de Jésus-Christ, même dans ses lettres à Trajan, où il cite les christiens comme une secte issue du Judaïsme. Épictète, le grand moraliste, le philosophe à qui l’examen d’aucune croyance religieuse n’échappe, a ignoré Jésus-Christ, lui qui était né dans l’Asie-Mineure, qui vint à Rome sous Néron et fut exilé sous Domitien, lui dont les entretiens furent recueillis par son disciple Arrien. Pomponius Mela, qui écrivit en l’an 43 (dix ans après les miracles inouîs du Vendredi-Saint) son grand et savant ouvrage Des Contrées du Globe, fit de la géographie à la manière de Strabon, c’est-à-dire joignit à la description de chaque pays étudié par lui les principaux aperçus des événements qui s’y étaient accomplis ; et il est complètement muet sur Jésus-Christ, quand il parle de la Judée !…
Et Plutarque ?… Il est né en 50 à Chéronée, en pleine Grèce, dans cette contrée où l’Église affirme que les disciples du Messie Jésus se sont répandus après la Pentecôte, qu’ils ont évangélisée, qu’ils ont remplie de prodiges au spectacle desquels