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LA VIE DE JÉSUS

Se tromperait-on beaucoup en voyant l’origine du Christianisme dans la secte de Judas Christos le Galiléen, adversaire du parti sacerdotal juif et du paganisme gréco-romain ? Ces judaïtes christiens sont mentionnés dès le règne de Néron, étant déjà répandus sur divers points de l’empire et persécutés. Après la ruine de Jérusalem, leurs survivants sont esclaves, et les premiers chrétiens nous sont représentés comme mêlés partout aux esclaves, faisant de la propagande religieuse parmi les esclaves, et s’assemblant secrètement dans les catacombes avec les esclaves païens qu’ils convertissaient à leurs idées d’émancipation. Est-il insensé de supposer que, se cachant pour leur propagande, ce sont les judaïtes qui ont imaginé ces fraternelles agapes, dont on a fait plus tard la communion eucharistique, et que des légendes vagues et contradictoires se soient formées, mêlant et dénaturant les souvenirs des Jean et Simon, des Judas et Jésus ?

Rien n’est plus caractéristique, en effet, que la date à laquelle le Christianisme fixe la première persécution contre les disciples de Jésus : c’est en l’an 64, disent les docteurs de l’Église, que Néron promulgua son édit. Eh bien, cette année 64 est précisément celle où Éléazar, parent et disciple de Judas le Galiléen, leva en Palestine l’étendard de la révolte contre la puissance romaine ; c’est alors que les judaïtes massacrèrent 3,000 soldats de l’empire, qui se trouvaient en garnison à Jérusalem. Il n’est pas étonnant qu’en présence de ce soulèvement, de cette rébellion sanglante, Néron, ne se bornant pas à ordonner la répression en Judée et en Galilée, ait édicté des mesures despotiques contre tous les Juifs épars sur les divers points de l’immense territoire soumis à ses proconsuls ; il n’est pas étonnant qu’il ait fait rechercher en Italie les membres de la secte judaïte, plus particulièrement même que les autres israélites, et qu’il ait livré au supplice tous ceux qui purent être découverts à Rome, voyant en eux des conspirateurs. La persécution de Néron s’appliqua donc nécessairement aux disciples du Christos Judas, lequel n’est pas un mythe. Puis, à partir des règnes de Vespasien et de Titus, c’est-à-dire après la ruine de Jérusalem, conséquence de l’insurrection d’Éléazar, les survivants de la nation juive, dispersés dans tout l’empire, furent tenus partout en suspicion, et il est très probable que, parmi leurs diverses sectes, celle des judaïtes fut la plus traquée et persécutée. N’est-on pas fondé à Croire que, pour mieux se dissimuler, pour dérouter les soupçons, les chefs de cette secte ont pu masquer leur rattachement à Judas le Galiléen en fabriquant toutes ces légendes diverses, dont les prêtres ont tiré ensuite les éléments des évangiles ?

Évidemment, ceci n’est qu’une hypothèse et n’a pas d’autre valeur ; mais il est impossible de ne pas constater que si, dès cette époque, quelques auteurs parlent de christiens (christiani), qui peuvent fort bien avoir été des judaïtes, aucun historien ne connaît, par contre, le Jésus-Christ de l’Évangile, ni son cor-