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LA VIE DE JÉSUS

circonstance ; mais c’est comme cela… Arrangez-vous comme vous voudrez.

Judas sortit du Temple ; mais, avant de mettre le pied hors du palais, il jeta sa bourse dans le sanctuaire. Après quoi, il descendit vers le Cédron, s’arrêta dans les environs de l’endroit où le torrent d’Hinnom s’y jette, et là il se pendit à un arbre dans le champ d’un potier. Les Actes des Apôtres ajoutent au récit de l’Évangile que la corde se rompit ; ce que nous ne ferons aucune difficulté d’admettre.

Il paraît qu’à cette époque le terrain ne coûtait pas cher à Jérusalem ; car, le lendemain, les prêtres, ayant appris le suicide de Judas, achetèrent le champ du potier avec les fameux trente-sept francs cinquante, et y firent ensevelir celui qui leur avait livré Jésus.

Les grandes lumières de l’Église catholique n’éclairent pas d’un même jour la mort de Judas. Un évêque, qui est une des plus hautes autorités dans le Christianisme, l’évêque d’Hiérapolis, nommé Papias, dont l’Église a fait un saint (sa fête se célèbre le 22 février), prétend, d’après les renseignements, dit-il, de l’évangéliste Jean, dont il fut le disciple, que Judas survécut à sa pendaison manquée, qu’il mena assez longtemps une joyeuse existence, qu’il prit de l’embonpoint et qu’il mourut par un accident de voiture.

Voir à ce sujet l’excellent et superexcellent abbé Migne, un homme qui est un puits de science, Patrologie grecque, tome V, page 1259.

En somme, la question n’a jamais été tirée au clair. L’évangéliste Matthieu dit que Judas s’est pendu et en est mort[1]. Luc, auteur d’un Évangile et des Actes des Apôtres, ne dit rien dans son Évangile, et, dans les Actes[2], qui en sont la suite, il raconte que le traître se pendit, mais que la corde s’est rompue. L’évangéliste Marc reste complètement muet sur la fin de Judas. Enfin, Jean, après avoir gardé le silence dans son Évangile, a raconté à l’évêque canonisé Papias, son disciple, que le mauvais apôtre se pendit, que la corde cassa et que le malpendu vécut de longues et heureuses années.

Démêlez donc quelque chose dans ce fouillis de contradictions.

Quant à mon opinion personnelle, je n’ai guère besoin de la donner ; on la connaît depuis longtemps : c’est que Jésus n’a jamais existé, ni Judas, ni Matthieu, ni Marc, ni Luc, ni Jean, et que les Évangiles ont été écrits au second siècle de l’ère chrétienne, époque où la religion à laquelle nous devons Alexandre VI Borgia et Mastaï Pie IX fut inventée.

  1. Matthieu, XXVII, 3-10.
  2. Actes des Apôtres, I, 18-19.