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LA VIE DE JÉSUS

le grand-prêtre de l’année courante qui le remplaçait. Autour de lui, sur des coussins posés à terre, étaient assis les autres juges, rangés en demi-cercle. Le Nasi avait à sa droite un autre gros légume intitulé le « Sagan » ou Père de la maison du Jugement, qui dirigeait les débats, et près de lui, les Sages, conseillers habituels de la cour. Aux deux extrémités se trouvaient deux secrétaires chargés, l’un de recueillir ce qui pouvait être dit de défavorable pour l’accusé, l’autre, tout ce qui était à sa décharge. Des officiers subalternes entouraient l’accusé, armés de cordes et de lanières, prêts à l’attacher plus solidement, s’il faisait mine de résister. On voit que les choses se passaient en ordre. Tel était le tribunal régulier devant lequel, au dire des évangélistes, comparut Jésus.

Par exemple, quelqu’un qui, dans cette affaire, n’allait pas avoir grande besogne, c’était le scribe chargé d’inscrire les dépositions favorables. En effet, les apôtres avaient joué des flûtes avec un ensemble remarquable ; aucun témoin à décharge ne se présentait pour déposer en sa faveur.

Le greffier appela. Le défilé des témoins commença. On voit d’ici que les accusations ne devaient pas manquer. Nos lecteurs, par cet ouvrage fait d’après même les racontars de l’Évangile, savent que Jésus avait mené une vie fort peu exemplaire : les renseignements qui furent fournis au tribunal sur la moralité et la probité du prévenu, produisirent, à coup sûr, sur le tribunal, une impression des plus mauvaises. Quant à ses forfanteries séditieuses, les preuves ne manquèrent pas ; deux témoins, entre autres, rappelèrent que Jésus, se trouvant à maintes reprises dans le Temple, avait dit : « Détruisez ce Temple ; je me fais fort de le rebâtir, à moi tout seul, dans trois jours. » On n’a pas oublié cette anecdote ; on sait que messire Christ, lorsqu’il se sentait soutenu par la multitude, avait affirmé qu’il possédait assez de puissance pour exécuter des tours de force extraordinaires.

Les témoins expliquèrent au tribunal que c’était à l’aide de ces fanfaronnades que Jésus séduisait la masse des naïfs, toujours prêts à croire sur parole les charlatans. On leur fit prêter serment. « Sachez, leur dit Caïphe selon l’usage, que le sang de l’innocent et de sa postérité retombera sur vous à tout jamais si vous mentez ! » C’était la formule consacrée. Les témoins, après cet avertissement solennel, répétèrent leurs dépositions.

Ce qui paraîtra comique à nos lecteurs, c’est que les quatre évangélistes traitent de faux témoins ces gens qui, en définitive, ont purement et simplement déclaré ce qu’eux-mêmes, les évangélistes, racontent.

Jésus ne répondait pas.

Caïphe se leva, et, s’adressant au prisonnier :

— Tu viens d’entendre, dit-il, cette déposition ; pour prouver à quel point tu as toujours cherché à en imposer aux ignorants, on déclare que tu as prétendu avoir la puissance de rebâ-