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LA VIE DE JÉSUS

Ce fut donc à Magdala qu’il reparut tout d’abord, quand il jugea que son exil avait assez duré.

Les saintes femmes l’accueillirent avec transport, cela va sans dire ; il y avait une demi-année qu’il leur manquait, et il n’avait pas donné de ses nouvelles, le vilain méchant !

Toutes les pieuses odalisques se rassemblèrent pour fêter le retour de l’ingrat ; on lui adressa de doux reproches, on lui fit promettre de ne plus recommencer de pareilles escapades ; après quoi, le pardon fut accordé par mille chatteries.

C’est à cette époque que l’Évangile place ce calembour idiot et resté légendaire, qui est attribué au Christ.

Interpellant un beau matin ses apôtres, il leur posa cette question à brûle-pourpoint :

— Voyons, vous qui allez et venez et qui entendez dire ce que l’on raconte dans le pays, que dit-on maintenant à mon propos ?

— Pour être francs, répondirent les apôtres, personne ne croit que vous êtes le Messie. Nous avons interrogé tout le monde à votre sujet ; les uns disent que vous êtes toqué ; les autres vous prennent pour Jérémie ressuscité, et encore ceux-là sont-ils ceux qui vous reconnaissent quelque pouvoir ; mais la grande majorité de nos compatriotes vous considèrent comme un cerveau brûlé ou un farceur.

— Et vous, poursuivit Jésus, qui dites-vous que je suis ?

Pierre prit la parole au nom de la bande :

— Nous, Rabbi, nous n’avons pas à changer d’idée. À nos yeux, vous êtes le fils du pigeon, et nous vous proclamons tel partout où nous passons.

— C’est bien, mes amis, je suis content de vous. Et toi, principalement, mon vieux Pierre, je te sais gré de t’être fait l’interprète de vous tous. Tu es un bon garçon. Aussi, écoute bien ce que je vais te dire… Tu es Pierre, n’est-ce pas ?

— Parfaitement, puisque vous m’avez donné ce nom-là en remplacement de celui de Simon.

— Tu es Pierre, dis-je ; eh bien, sur cette pierre je bâtirai mon église.

— Plaît-il ?

— Je bâtirai, entends-tu, une église sur cette pierre que tu es, toi, et les portes de l’enfer ne prévaudront jamais contre mon église.

— Les portes de l’enfer ?

— Oui, les portes

— Je ne saisis pas très bien.

— Cela n’y fait rien. Je te donnerai aussi un trousseau de clefs. Ces clefs seront celles du royaume du ciel, un royaume qui est situé là-haut, plus haut que la lune. Et quand tu déferas un nœud sur la terre, il y aura instantanément un nœud défait dans le ciel.

— C’est bien de l’honneur que vous me faites, Seigneur,