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LA VIE DE JÉSUS

L’Oint consentit à partir, mais à une condition : c’est que l’ex-possédé s’engagerait à célébrer sa gloire immense par toute la contrée.

Notre homme en prit l’engagement, et les autorités de Gergésa, qui ne lésinaient pas du moment qu’il s’agissait de se débarrasser de Jésus, payèrent le passage du Verbe et de ses apôtres sur un nouveau bateau.

On accompagna la sainte bande jusqu’à bord.

— Où faut-il que je transporte ces messieurs ? demanda le patron de la barque, en s’adressant à la municipalité gergésienne.

— Transportez-les où ils voudront, pourvu que ce soit le plus loin possible d’ici.

Jésus demanda à être rendu à Génésareth. Comme c’était tout à fait à l’autre extrémité du lac, les autorités acceptèrent avec enthousiasme.

Il était bon matin quand le Christ avait endiablé les six mille cochons ; reprenant aussitôt la mer, il put le soir même aborder aux rives de Génésareth.

Sitôt débarqué, Matthieu fit à la bande une proposition.

— Mes amis, leur dit-il, nous avons tous une faim atroce. Jugez donc ! Nous sommes à jeun depuis hier soir ; ces nigauds de Gergésiens ne nous ont pas seulement offert à déjeuner ce matin, tant ils avaient hâte de nous voir partir… Or ça, j’ai ici d’excellents camarades ; les publicains de Génésareth sont à tu et à toi avec ceux de Capharnaüm, ils se feront un plaisir de nous recevoir et même de nous offrir un banquet de premier ordre. Rapportez-vous-en à moi. Je vais les prévenir, et je reviens vous chercher.

Matthieu ne fut pas long.

Quand les publicains apprirent que Jésus serait aise de godailler en leur compagnie, ils en sautèrent de joie jusqu’au plafond.

L’apôtre, du reste, les avait renseignés.

— Bien qu’il parle comme un livre, leur avait-il dit, notre puissant chef n’est pas fier. Il est toujours disposé à rigoler d’une bonne farce. C’est un garçon charmant en société. Avec ça, d’une galanterie renversante ! Quand il est d’une partie, pour peu qu’il y ait aussi quelques femmes, on est sûr de s’amuser.

— Ah ! vraiment, la présence des femmes ne le gêne pas ?

— Pas le moins du monde.

— C’est que nous entendons parler des femmes que nous avons avec nous, de nos gonzesses, quoi ! ce sont des luronnes.

— Plus elles ont criblé leurs contrats de coups de canif, mieux elles lui vont. Il n’est pas bégueule, vous verrez.

— En ce cas, amenez-le vite. Le temps de mettre le couvert et de convoquer les dames, et nous commençons notre balthazar.