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LA VIE DE JÉSUS

Or, par une belle matinée du mois de mars, à l’éclosion même du printemps, à un moment où Marion était seulette dans sa chambre, un beau monsieur entra : il était fort joli garçon.

La brune enfant releva la tête et se montra étonnée ; mais sa surprise n’avait rien de désagréable, — au contraire.

Le beau jeune homme s’avança, un doux sourire sur les lèvres.

— Je vous salue, Marie, dit-il. Oh ! vous êtes vraiment pleine de grâce. On voit bien que le Seigneur est avec vous, lui, l’auteur de tout ce qui est charmant ; vous êtes privilégiée au-dessus de toutes les femmes ; l’enfant qui naîtra de vous sera certainement mille fois béni.

Marie était de plus en plus étonnée, et elle était en même temps ravie : jamais elle n’avait entendu une voix si mélodieuse à son oreille ; quelle différence avec l’organe grinçant du vieux barbon qu’on lui destinait pour époux !

Ce qui l’épatait, par exemple, au superlatif, c’était de s’entendre parler d’un gosse qui devait naître d’elle. Elle répondit au joli garçon (je prends textuellement la phrase dans l’évangéliste Luc, chapitre Ier, verset 34) : « Comment cela pourra-t-il se faire, puisque je ne connais point d’homme ? »

Cette innocente naïveté combla d’aise le joli garçon.

— N’ayez aucun souci de cela, répliqua-t-il, ô gracieuse Marie ; n’ayez aucune crainte ; c’est là un détail insignifiant. Je m’appelle Gabriel et suis ange de mon métier ; ainsi, vous pouvez vous en rapporter à moi. Laissez la vertu du Très-Haut vous couvrir de son ombre, et vous verrez ensuite. Je vous le dis, ma mignonne, vous aurez un enfant, vous lui donnerez le nom de Jésus, et tout le monde l’appellera le Fils de Dieu.

Dès ce moment, la petite Marie était convaincue.

— Je suis votre servante, dit-elle en s’abandonnant aux volontés du Seigneur ; qu’il me soit fait selon votre parole.

Que se passa-t-il alors dans la maison de Nazareth ? demande feu Mgr Dupanloup qui, lui aussi, a écrit la Vie de Jésus. Et le saint évêque ajoute : — À cet instant, le Verbe se fit chair.

Va pour le Verbe !

L’ange Gabriel, une fois sa mission terminée, secoua ses blanches ailes et disparut, toujours par le plafond.

La Vierge était fécondée ; l’opération du Saint-Esprit avait obtenu une réussite complète.

À ce propos, je me permettrai de poser une simple question à mon vieil ami notre Saint-Père le Pape : — Pourquoi les Évangiles appellent-ils indifféremment Jésus-Christ le « Fils de Dieu » ou le « Fils de l’Homme » — C’est que « Fils de l’Homme » ou « Fils de Dieu », ce n’est pas la même chose, saperlipopette ! D’autant plus que Gabriel est un mot hébreu qui veut dire textuellement : l’Homme de Dieu.

Saint-Père, vous seriez bien aimable de nous expliquer cela au prochain concile ; car, si des fidèles allaient s’imaginer que