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LA VIE DE JÉSUS

— Alors, tu es d’avis que ces scélérats doivent jouir des délices de notre céleste séjour ?

— Pourquoi pas ?

— Eh bien, comment tous ces milliards, tous ces trillions et quatrillions de péchés seront-ils expiés ?

— Je m’offre à subir cette expiation. Je m’incarnerai dans la peau d’un homme, et, à un moment donné, je me laisserai pendre. Je serai la victime et paierai les pots cassés pour tout le monde.

Le pigeon n’avait rien dit, mais il n’en pensait pas moins. Il jugea utile à cet instant de faire connaître son opinion :

— Je partage la manière de voir de Jésus. Il y a, à Nazareth en Judée, une jeune fille dont je ferais volontiers mes choux gras. Un de nos archanges ira m’annoncer à elle et l’embobinera comme il convient. Je me charge ensuite de l’affaire. Ce sera dans la peau du moutard que Jésus s’installera.

— Parfait, appuya Jésus. Nous appellerons ça le mystère de l’Incarnation. Une fois que je serai au nombre des hommes, je ferai tant et si bien que mes compatriotes me condamneront à mort et me crucifieront à l’âge de trente-trois ans.

— Si cette perspective te sourit, mon cher Jésus, conclut Jéhovah, je n’y vois aucun inconvénient. Tout ce que je demande, c’est que, malgré ton expiation solennelle, l’enfer ne soit pas supprimé. Tu payeras pour tous les pécheurs en bloc ; mais tous les pécheurs n’en seront pas moins rôtis en détail. Nous créerons même à leur intention un nouveau four, qui sera le purgatoire.

Telles furent les bases de l’accord intervenu entre les trois personnes de la Trinité.

Et il en advint ainsi.

Jésus fut incarné comme nous l’avons vu dans les premiers chapitres de cet ouvrage, et nous verrons par la suite qu’arrivé à l’âge de trente-trois ans il consentit à se laisser arrêter et pendre à une croix par les pharisiens et par le haut clergé juif.

Nous savons aussi que, malgré son dévouement pour les humains, et bien que Jésus eût expié par son sang tous les péchés passés et futurs des mortels, Jéhovah n’en a pas moins continué à exercer ses vengeances, en fourrant les pauvres pécheurs soit en purgatoire, soit en enfer.

Quoi qu’il en fût, Jésus se devait à lui-même de ne point se laisser pincer par les pharisiens, « avant que son heure fût venue. »

C’est pourquoi, cette fois encore, quand il eut constaté que la guérison de l’homme à la main sèche avait exaspéré les pharisiens, il joua des guibolles et se réfugia au nord du lac de Tibériade.