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LA VIE DE JÉSUS

la truelle de la main gauche, avait pris le parti de mendier pour subvenir aux besoins de son existence.

Jésus alla droit à lui.

Les pharisiens — il y en avait toujours partout — devinèrent ce qu’il se proposait de faire ; aussi, s’empressèrent-ils d’intervenir.

— Pardon, demanda l’un d’entre eux, est-ce que vous auriez la prétention de guérir cet homme ?

— Plaît-il ? fit Jésus, se retournant avec une certaine arrogance et affectant de ne pas avoir entendu la question.

— Je vous demande, monsieur, si votre intention est d’exercer votre talent de rebouteur en faveur de cet homme à la main sèche.

— Et pourquoi, monsieur, cette interrogation, s’il vous plaît ?

— Parce que, monsieur, il est aujourd’hui samedi.

— Je le sais, monsieur !

— Eh bien, le samedi, monsieur, l’exercice de la médecine est rigoureusement interdit !

— C’est possible, monsieur ; mais ma médecine, à moi, n’est pas de la médecine.

— Je vous demande bien pardon, monsieur ; si vous vous permettez de guérir cet homme, vous enfreindrez les prescriptions du sabbat, entendez-vous bien, monsieur ?

Tous les fidèles présents dans la synagogue étaient vivement impressionnés par cet échange de paroles remplies, de part et d’autre, d’aigreur. Nul ne savait qui allait avoir le dessus.

Le Verbe, habile à mettre la foule de son côté, riposta par cette comparaison adroite :

— Je voudrais bien savoir s’il est un homme qui, lorsqu’un de ses moutons vient à tomber dans un fossé le jour du sabbat, ne descend pas au fond pour l’en retirer ?

Le coup était bien porté. Des murmures d’approbation accueillirent le raisonnement de l’Oint.

Sentant alors que la masse était pour lui, il ajouta :

— Or, comme la santé d’un homme vaut plus que la vie d’un mouton, je conclus qu’il est parfaitement juste d’opérer des guérisons, même le jour du sabbat.

Puis, s’avançant vers le maçon à la main sèche, il lui dit :

— Montrez votre main.

Le maçon tendit la main. Jésus l’examina.

— Mesdames et messieurs, continua-t-il, comme les mauvaises langues pourraient prétendre que cet homme est un compère préalablement entendu avec moi pour me donner le prétexte de vous épater, je vous prie d’examiner sa main droite et de constater par vous-même qu’elle est absolument sèche.

Et s’adressant au maçon :

— Veuillez, mon ami, circuler parmi cette foule, et montrez votre main à toutes ces dames et à tous ces messieurs.

Le maçon obéit. Les méfiants pincèrent sa main très fort