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LA VIE DE JÉSUS

lirent de joie au milieu de leurs souffrances, et conçurent l’espoir de voir mettre un terme à leurs maux.

Ils attendirent que le soleil, descendu sous l’horizon, eût marqué la fin du jour ; car le samedi, chez les juifs, était consacré au repos, et le fait d’aller se faire raccommoder une jambe était considéré comme un travail enfreignant la loi.

Mais dès que le soir fut venu, ce fut un débordement d’éclopés dans les rues de Capharnaüm. Jamais les habitants n’avaient vu pareille procession : on se serait cru à une descente de la cour des Miracles.

Les fiévreux grelottaient de tous leurs membres ; les possédés se tordaient en convulsions épileptiques ; les fous faisaient des grimaces, au grand amusement des gamins de la ville ; la majeure partie exhibaient des plaies dégoûtantes, des chancres hideux : certains malheureux, affligés de la danse de Saint-Gui, se livraient à un chahut désordonné ; les paralytiques se faisaient charrier dans des brouettes. Il ne manquait à ce carnaval de malades que des décapités portant leur tête sous le bras.

Cette foule grouillante eut bientôt assiégé la maison de Simon-Caillou, où l’on savait que le grand rebouteur était descendu.

Et tous de réclamer le sorcier :

— Rabbi ! rabbi ! ayez pitié de nos douleurs ! guérissez-nous !

Jésus ne se fit pas trop prier. Pour ce que les miracles lui coûtaient, il aurait eu tort de les marchander aux infortunés solliciteurs.

Donc, au fur et à mesure qu’un malade se présentait, il étendait ses mains sur lui et le guérissait d’un seul mot. Ce n’était pas plus malin que cela.

Quand c’était le tour d’un possédé, Jésus commandait au diable de quitter le corps dont il avait fait sa proie. Le démon alors poussait une litanie de blasphèmes à faire dresser des cheveux sur la tête d’un chauve ; mais il obéissait tout de même. C’était par la bouche ou par les narines qu’il s’échappait.

En sortant, le diable ne manquait pas de s’écrier :

— Sacré nom de nom ! faut-il tout de même que vous soyez puissant pour me mettre ainsi hors de mon domicile ! Bien sûr, vous n’êtes pas un prophète ordinaire, vous êtes le Fils de Dieu !

Le Verbe ne s’enorgueillissait pas de ces hommages rendus ainsi à sa divinité. Bien au contraire, il était vexé de voir les démons révéler son état-civil. L’Évangile nous dit, en effet, que Jésus menaçait les diables et les empêchait de proclamer ce qu’ils savaient, c’est-à-dire qu’il était le Christ.

Au premier aspect, cette conduite est faite pour étonner ; mais, en y réfléchissant un peu, on voit combien elle était logique.