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LA VIE DE JÉSUS

cher, venez à Capharnaüm, venez avant que mon pauvre enfant meure !

Admirons, en passant, l’ingénuité de ce militaire ; il croyait au pouvoir surnaturel de Jésus, puisqu’il venait réclamer de lui un miracle. Or, si le Christ était capable d’opérer des prodiges, il n’avait pas besoin d’aller à Capharnaüm pour guérir l’agonisant. Il pouvait fort bien exécuter ses petits trucs à distance.

C’est ainsi, du moins, que Jésus jugea ce qu’il avait à faire. Il avait sans doute quelque rendez-vous pour le soir dans les environs, et il se souciait peu de courir à plusieurs lieues de Cana, quand il lui était loisible de sauver la vie des moribonds sans se déranger.

Aussi, tandis que l’officier réitérait son invitation, il lui répondit :

— Inutile, mon cher ami, que je me rende au chevet de votre fils ; à cette heure, il est vivant.

— Vivant ! s’écria le père. C’est possible ; mais, en tout cas, il est bien près de cesser de l’être.

— Non, non ; votre fils se porte comme un charme.

— Seigneur, est-ce bien vrai ?

— Allez, et vous verrez… Une ! deux !… Votre fils est guéri !

L’officier royal, rassuré par ces paroles, se releva en bénissant le divin rebouteur.

Après quoi, il se mit en route pour se rendre à Capharnaüm. Il était alors la septième heure du jour, ce qui correspond à une heure après midi, suivant la manière actuelle de compter le temps.

Notre homme avait une foi telle dans les paroles du vagabond, qu’il ne se pressa point d’arriver près de son fils. En chemin, il s’arrêta et passa la nuit dans une auberge.

Le lendemain matin, comme il venait à peine de se mettre en route, il aperçut ses domestiques qui, eux, de leur côté, allaient à Cana.

— Réjouissez-vous, crièrent-ils, croyant lui apprendre une grande nouvelle. Votre fils se porte bien.

— Je le sais, fit-il avec flegme… Et à quelle heure s’est-il trouvé mieux ?

— Hier, à la septième heure.

— J’en étais sûr.

Pas besoin de vous dire que les domestiques ne comprirent rien à la profonde perspicacité de leur patron. (Jean, chap. IV, versets 46-54.)

Ils se cassèrent la tête à démêler le mystère de cette étonnante aventure.

L’officier, lui, ne raconta qu’à sa famille ce qui s’était passé, et toute la famille se convertit.

Quant à nous, nous n’hésiterons pas, amis lecteurs, à donner un bon point à Jésus. Dans cette affaire-là, il se comporta très bien. — Le malheur est que le personnage n’ait jamais existé.