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LA VIE DE JÉSUS

CHAPITRE XXIV

LE PREMIER CAMOUFLET

Une fois qu’il eut terminé sa propagande en Samarie, Jésus repartit pour la Galilée, se dirigeant vers Nazareth.

Les railleries de ses compatriotes, après l’affaire de Cana, lui tenaient au cœur, et il ne désespérait pas de passer à la longue pour un grand personnage auprès des villageois qui l’avaient connu simple charpentier.

Il espérait que son esclandre de Jérusalem aurait fait du bruit jusqu’à Nazareth. Il se disait que, s’il parvenait à augmenter un peu sa renommée pendant le reste de son voyage, il obtiendrait un véritable triomphe dans l’humble cité habitée par sa famille.

Pour atteindre ce résultat, il se donna, partout où il eut l’occasion de s’arrêter, comme étant un docteur très expert dans toutes les matières théologiques.

On l’accueillait alors dans les synagogues et on lui demandait un bout de sermon. Je vous laisse à penser si le gaillard s’en donnait à cœur-joie et si sa langue allait bon train.

Sur un verset de la Bible, le premier venu, il faisait une dissertation à n’en plus finir.

Notez que, bien qu’il n’eût suivi aucun cours spécial, il avait bien le droit de se dire docteur. Ce qui eût été illégitime de la part d’un autre était fort naturel chez lui. En somme, il était fils du pigeon ; il possédait la science infuse ; les balourdises qui pouvaient s’échapper de sa bouche étaient des oracles, du moment qu’elles émanaient de lui, individu divin. Le pigeon, son père et son co-associé dans la Trinité, était seul responsable de ses discours ; c’était le pigeon qui les lui inspirait ; en cas de boulette, le coupable était le pigeon : c’est clair.

Il allait donc son chemin, sans prendre garde à la critique.

Quand il mettait le pied dans une ville, il s’empressait de se rendre tout d’abord à la synagogue, au moment des offices.

Les synagogues, à cette époque, étaient toutes bâties sur le même modèle. Elles ne différaient que par la richesse et la grandeur, suivant l’importance des villes. Leur plan uniforme était celui-ci : une longue salle s’étendant entre deux portiques, et terminée par un sanctuaire.

On n’y voyait ni images, ni autel, mais un coffre de bois couvert d’un voile et renfermant les livres sacrés d’Israël. Ce meuble, qui rappelait par sa forme la caisse dans laquelle se