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UN DIVORCE

taient pourtant de grandes douceurs, ne se quittant plus, causant sans cesse, de la voix et du regard, et dormant ensemble. Fernand racontait à Claire des rêves étranges qu’il faisait, où il s’envolait avec elle, loin, très-loin. Il demanda sa petite sœur, sa tante, son ami Camille, et donna ses joujoux à la petite Clara.

— Mais quand tu seras guéri ? lui demanda celle-ci.

— Oh ! je ne sais pas. C’est égal, va, prends toujours.

Il ne croyait pas mourir, assurément, et ne songeait pas même que cela pût être. Mais des prévisions instinctives existaient en lui. Il dit une fois :

— Maman, quand même on est enfant, on peut être malheureux, n’est-ce pas ?

— Hélas ! oui, répondit Claire en pleurant.

— Oui, car j’ai été malheureux, moi ; mais à présent tu ne me quitteras plus ?

— Je te le promets, dit-elle.

Quelquefois, le cœur de ce pauvre enfant se soulevait encore, au souvenir d’injustices ou de chagrins qu’on lui avait faits.

— Maman, sais-tu pourquoi l’on est méchant ? demandait-il avec des yeux agrandis par l’étonnement et par la tension de sa pensée.

Le huitième jour, il ne parlait plus qu’à peine, et ce n’était guère que par le regard et par la pression de ses bras, qui sans cesse attiraient sa mère, qu’il lui communiquait sa pensée et son désir. Ce même jour, Claire, penchée sur lui, le contemplait avec une ardente angoisse, quand, relevant tout à coup la tête, elle vit en face d’elle Herminie, madame Fonjallaz.

Une expression terrible anima ses traits :

— Hors d’ici ! s’écria-t-elle, hors d’ici, détestable femme, vous qui m’avez tué mon enfant !