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UN DIVORCE

elle retournait du côté de l’avenue, lorsqu’après un nouveau regard elle parut saisie de surprise et d’émotion. Une vive rougeur colora son visage ; elle rentra dans l’avenue et se dirigea lentement vers le massif de sapins le plus proche. Bientôt, parut à la grille un voyageur poudreux qui marchait d’un pas rapide, et qui, en apercevant Claire, poussa un cri de joie et courut vers elle. Ils pénétrèrent ensemble dans le massif, garni à l’intérieur d’un banc, sur lequel la jeune femme, vivement émue, se laissa tomber. Camille se plaça près d’elle. Il avait la figure tout éclairée de bonheur.

— Enfin, dit-il, enfin ! ne pensiez-vous pas que j’allais venir ?

— Vous n’avez donc pas reçu ma lettre ? demanda-t-elle.

— Laquelle ?

— Je vous ai écrit il y a trois jours.

— Non, il y a deux jours que j’ai quitté Paris. Cette lettre-là, ma Claire, était-elle plus tendre que l’autre ?

— Ne m’accusez jamais de manquer de tendresse pour vous. Si vous saviez…

— Mais comment pouvez-vous, si vous m’aimez, consentir à vivre loin de moi ? J’ai supporté cette absence de trois ans, tempérée par de si rares entrevues, parce que c’était nécessaire, parce qu’il le fallait ; mais à présent, vous êtes libre, libre entièrement, et par la loi et par la mort de votre père, et, de plus, par le mariage de M. Desfayes. Des craintes, chimériques peut-être, ne sont pas un obstacle capable d’arrêter un amour ardent ; non, Claire, vous ne m’aimez pas assez.

— Mon ami, je vous ferais avec bonheur tous les sacrifices ; mais quand il s’agit de mon enfant, de sa santé,