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UN DIVORCE

— Garde-le donc, ma fille, répliqua M. Sargeaz avec émotion, jusqu’à ce qu’Étienne te le redemande.

On présenta les deux petits garçons l’un à l’autre. Fernand demanda :

— Qui est-il, maman ?

— Ce sera ton frère, dit Claire en souriant.

Fernand devint très-rouge et se cacha le visage sur les genoux de sa mère. Elle le prit dans ses bras.

— Quoi ! tu es jaloux ?

— Je ne veux pas qu’il soit ton fils ! dit l’enfant en la serrant de toutes ses petites forces et en sanglotant.

— Eh bien ! non, ce sera le fils de tante Anna ; mais tu ne veux-tu pas l’aimer ?

— Oh ! si… répondit-il en tournant un œil humide vers son nouveau compagnon.

Puis il se rejeta sur le sein de sa mère, et, les bras autour de son cou, il la contemplait avec cette tendresse consciente d’elle-même, que d’ordinaire n’ont pas les enfants. Dans ce regard, où l’ardeur d’une âme adulte s’unissait à la limpidité de l’enfance, la mère, elle aussi, heureuse et charmée, noyait son regard.

— Savez-vous, mon frère, dit madame Grandvaux, vous devriez venir habiter avec nous, vous, Mathilde, et monsieur, qui ne doit pas vous quitter ? Je vous céderais la chambre de mon pauvre Auguste, et je coucherais dans celle d’Anna. M. Schirling, qui n’a point amené ses enfants, nous cédera bien deux chambres. Nous vivrons en famille aussi longtemps que cela vous conviendra.

— Sir John Schirling est ici ? s’écria M. Sargeaz.

— Oui, mon frère, il est revenu depuis quinze jours avec son neveu. Cela même avait fait grande joie à mon pauvre défunt ; car il les avait toujours regrettés, et nous n’avions eu affaire depuis ce temps qu’à de mauvais