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UN DIVORCE

je vous le jure. Je ne suis plus la même ; j’ai beaucoup changé depuis hier… Je suis venue vous dire tout ce que j’ai pensé pendant cette nuit. Les juges ont eu tort, ils n’ont pas compris… Ces choses-là ne se peuvent pas faire. Je vois bien à présent que j’ai eu tort… qu’il est impossible… Nous ne pouvons pas nous séparer…

— Madame, c’est vous-même qui avez voulu briser nos liens, et la loi ne saurait admettre de pareils caprices. Après tant d’injures échangées entre nous, la morale publique elle-même serait froissée de nous voir ensemble.

— Ah ! oui, dit-elle, vous m’avez fait bien du mal ! vous avez, Ferdinand, déshonoré votre femme ; vous m’avez calomniée. Mais je ne vous en veux pas ; désormais, je veux tout vous pardonner.

— Oseriez-vous soutenir, s’écria-t-il avec une vive colère, que M. Camille n’est pas votre amant ?

— Non, je ne suis pas sa maîtresse ! Oh ! non, je t’assure ! Comment peux-tu me croire coupable de cela répondit-elle en attachant sur lui ses beaux yeux si purs.

Chancelante d’émotion et de faiblesse, elle étendait la main vers la table pour s’y retenir, quand M. Desfayes la soutint et la fit asseoir dans un fauteuil.

Puis, se détournant brusquement, il se mit à marcher par la chambre, en se frappant le front, et en poussant quelques vives exclamations.

— Quelle situation étrange ! s’écria-t-il enfin. Claire, vous n’êtes pas ici à votre place. Désormais, tout le passé n’existe plus.

Elle regardait cette chambre où, sauf le désordre d’objets à l’usage d’un homme, qui traînaient çà et là, rien n’était changé ; la commode, les rideaux, sa table à