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UN DIVORCE

nimité qu’il vous plaira. Vous porterez, s’il faut, cette chaîne toute votre vie, soit que vous ne puissiez la rompre, soit que vous ne l’osiez pas. Je ne dirai rien ; je ne réclamerai pas ; je souffrirai, j’attendrai, j’espérerai peut-être ; mais je ne dirai rien. Le jour seulement où vous serez enfin lasse, et où vous aurez besoin que la force d’action d’un homme dévoué s’ajoute à la vôtre, vous m’appellerez, n’est-ce pas ? N’est-ce pas, Claire ? ajouta-t-il, avec une si vraie tendresse, que les yeux de la jeune femme se remplirent de larmes.

— Oh ! que vous êtes dévoué ! Oh ! que vous êtes bon ! dit-elle.

— Pas complétement, chère amie, il me faut en retour un don, une promesse de vous.

— Laquelle ? demanda Claire avec empressement.

— Ce que je vous demande, vous l’avez dit de vous-même tout à l’heure. C’est une mesure protectrice pour vous, nécessaire à votre dignité ; mais je veux que ce soit aussi un engagement sacré entre vous et moi. Vous allez donc me promettre, à moi, vous entendez, à moi, Claire, de ne plus être la femme de celui qu’on appelle encore votre mari.

Claire baissa la tête en rougissant, et pendant quelques instants elle hésita.

— Oh ! Camille, il me semble que je ne dois pas faire cela, Que je décide ainsi, dans ma conscience, à la bonne heure. Mais vous promettre cela, à vous, ce serait vous accepter pour amant.

— Et ne le suis-je pas ? s’écria-t-il. Chère naïve, de quoi parlons-nous ? Et de quoi notre cœur est-il plein en ce moment, si ce n’est d’amour ? N’ayons pas peur des mots : soyons francs, va, nous n’en serons que plus honnêtes. J’ai vingt-neuf ans ; je ne suis lié par devoir ni