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UN DIVORCE

— Oh ! laissez-moi, balbutia-t-elle, j’ai eu tort ; je ne devais pas…

— Claire, faisons un pacte ; aimons-nous. Je vous donne mon cœur et ma pensée, mon bras aussi, et soyez sûre, chère femme, que vous serez bien aimée ! bien aimée ! et par conséquent moins malheureuse ! Vous me donnerez aussi votre cœur et votre pensée, rien de plus, et cela me rendra, moi aussi, très-heureux. Le voulez-vous ?

— Ah ! oui, je le voudrais ! Mais ce serait mal !

— Et comment serait-ce mal, pauvre chère enfant. Que ferez-vous de l’amour qu’il y a dans votre âme, dont M. Desfayes ne veut pas et que vous ne pouvez plus lui donner ? L’éteindre ? ce serait un crime ! Vous ne le pourriez pas d’ailleurs. Ne vous défiez pas de moi, Claire. Je sais que les plus délicieuses émotions de la vie, ce sont les plus hautes, et c’est de celles-là surtout que je veux vivre. Il ne me viendra jamais à la pensée de chercher des joies dans vos troubles et dans vos chagrins. Je vous ai aimée avant votre mariage, puis j’avais étouffé cet amour ; mais il m’est revenu en vous voyant si malheureuse. Ne craignez rien. Ne comprenez-vous pas que je serai assez heureux d’être, moi, votre seule espérance et votre seule joie, de vous soutenir, de vous aider, de vous consoler, ma pauvre Claire, si bonne et si belle, qui mériteriez tant de bonheur, et qui n’avez rien ! Si vous saviez quelle immense indignation j’éprouve de vous voir souffrir ! Eh bien ! si vous consentez à puiser votre consolation dans mon amour, je souffrirai moins pour vous, et ce sera mon bonheur, à moi.

— Oh ! que vous êtes bon ! dit-elle, vivement touchée. Camille, je vous l’avoue, je me suis dit souvent, non sans me reprocher ces pensées, que j’aurais été bien heureuse avec vous.