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UN DIVORCE

non, il te plaint beaucoup au contraire ; mais il dit que c’est un mauvais exemple. Il dit que, si toutes les femmes qui ont à se plaindre de leurs maris faisaient comme toi, il n’y aurait plus de ménages possibles. Cependant une chose, paraît-il, te justifie beaucoup, c’est que ton mari aurait compromis ta dot.

— C’est le moindre des chagrins qu’il m’a faits, dit Claire.

— Enfin, que veux-tu, ma chère, moi, je suis obligée d’obéir à mon mari.

— Fanny, tu sais que nous ne pouvons, faire une longue promenade ! cria M. Renaud.

— Adieu, ma chère. Excuse-moi. Je t’assure que cela me peine d’être obligée de t’abandonner. Louise, en sa qualité de femme de ministre, est dans une autre situation que moi, et je sais qu’elle doit venir te parler.

Cependant M. Grandvaux avait eu une entrevue avec son gendre ; quand il revint de Lausanne, Claire était allée à sa rencontre, toute pâle de saisissement.

— La ! la ! je n’aime pas ces bêtises, dit le bonhomme, sur la figure duquel elle avait cherché vainement à lire, et qui avait seulement cet air actif et préoccupé que lui donnaient les affaires. Te voilà blanche comme une feuille de papier, comme si tu n’avais pas une famille qui te soutient, et un père qui entend les affaires et qui te sauvera de ce mauvais pas. Ce qui est fait est fait ; ce qui est à faire se fera ; voilà tout, et il n’y a pas à chercher autre chose, ni à fouiller dans le pot au noir. Je te répète que je sauverai ta dot. Avec les intérêts, tu auras largement de quoi vivre ainsi que tes enfants. Je ne te ferai pas payer une grosse pension, moi ; il faudra même que tu mettes beaucoup de côté. Tu verras que tu ne seras pas si mal avec ton vieux père, et ça ne me fera