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UN DIVORCE

sintelligence. Ils se rappelaient tous deux qu’ils avaient pu se rapprocher, s’unir un instant. Mais le trouble recommença au sujet de Louise.

M. Desfayes éprouvait pour cette fille une antipathie décidée, sans doute parce qu’elle était le témoin forcé des dissentiments du ménage, et qu’il voyait bien qu’elle avait pris parti contre lui. Pour une paire de souliers assez mal cirée, un jour, il la traita si grossièrement qu’elle vint en pleurant déclarer à sa maîtresse qu’elle n’y tenait plus et voulait quitter la maison sur l’heure.

Madame Desfayes essaya vainement de l’apaiser. En fille bien apprise, Louise débita qu’elle n’avait que son honneur, que dans tout le village où elle était née il ne se trouvait pas de fille plus honnête, qu’elle ne pouvait souffrir d’être appelée d’un vilain nom, et que ça ne lui serait pas arrivé si elle n’avait eu le malheur de tomber dans la maison d’un…

Et, montrant qu’elle connaissait aussi son vocabulaire, elle rendit bravement à son maître l’équivalent de l’épithète qu’elle avait reçue.

Le front de Claire s’était empourpré.

— Vous serez libre dans huit jours, dit-elle, je vais m’occuper tout de suite de vous remplacer.

Louise alors éclata en protestations de dévouement pour madame et les petits : elle n’aurait jamais voulu les quitter ; mais ça n’était pas sa faute, et elle était assez malheureuse de se trouver sans place. Avant d’entrer dans une autre maison, elle y regarderait à deux fois ; mais ce qui la fâchait le plus, c’était de laisser une pauvre dame aussi malheureuse.

Oh ! oui, elle était malheureuse, la pauvre madame, la belle et riche Claire ! Après que la domestique fut partie, appuyant son front brûlant sur le joli balustre de fer ou-