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CHAPITRE XIV


À l’heure du souper, Ferdinand ne parut pas. Claire coucha ses enfants et s’assit près du berceau du petit Fernand, qui dormait les paupières à demi ouvertes, agité de tressaillements nerveux. La tristesse, la solitude, l’épouvante qu’il y avait dans son âme, elle n’eût su les exprimer par des paroles. Elle ne voyait plus que des ruines dans son intérieur désolé. L’âme du foyer s’était envolée. Il n’y avait plus là que des murs et des objets, du silence, du froid, deux enfants attristés à élever dans cette ombre, au hasard, pour une destinée inconnue.

Que faisait-il ? quels étaient ses desseins ? qu’y avait-il dans son âme ? Tout pour elle était là. Elle avait si bien l’habitude d’attendre de lui l’impulsion qui la faisait vivre ! Elle était épouvantée au souvenir de ses menaces. Elle pressentait une existence toute composée désormais de contradictions incessantes, de tourments répétés, de conditions impossibles. Il pouvait tout sur elle, hors la tuer d’un seul coup.

Elle eut peur ; elle trembla, dans sa profonde faiblesse,