Page:Léo - Un divorce, 1866.pdf/311

Cette page a été validée par deux contributeurs.
299
UN DIVORCE

— Quelqu’un, au fond, avait-il des torts dans tout cela ? M. Dubreuil ne le savait pas et ne voulait point entrer dans de semblables investigations ; mais c’était une chose fort grave, très-grave, que la réputation d’un homme établi, d’un père de famille, d’un homme qui… d’un homme, enfin, qui était l’associé de la maison Dubreuil. Une si charmante dame n’aurait pas dû être si vive ; elle aurait dû réfléchir aux conséquences ; d’autant plus que, dans ce cas, rien n’autorisait… car madame Fonjallaz, comme cliente de la maison, avait le droit de se trouver là, et tout le monde blâmerait de pareils emportements, qui n’avaient pas de cause suffisante. Certes, pour une petite dame aussi aimable et aussi intelligente, elle n’avait pas été semblable à elle-même du tout. Aurait-elle raison dans sa jalousie, — d’après ce qui venait de se passer, il en doutait fort, — elle aurait toujours dû se rappeler qu’elle ne devait point exciter la colère de son mari, et que ce qu’il y a de plus précieux dans les familles, c’est-à-dire l’apparence de l’ordre et de la paix, doit être avant tout conservé.

M. Dubreuil enfin, avec l’autorité d’un homme sage, écrasa la pauvre Claire sous le poids de son imprudence ; imposa silence, par sa politesse glaciale, à Mathilde, qu’il confia pour son affaire aux soins du premier commis, et obtint de Ferdinand qu’il ferait trêve à sa juste indignation pour reconduire solennellement sa femme, en lui donnant le bras, jusque chez elle. Selon M. Dubreuil, c’était le moyen de tout réparer et de faire cesser les mauvais propos.

Après le terrible accès qui l’avait saisie, Claire était tombée dans une prostration presque complète. Étonnée elle-même au souvenir de ce qu’elle avait osé dire, les arguments de M. Dubreuil et son blâme achevèrent de