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UN DIVORCE

que des regards malveillants, qu’elle traversait la tête haute avec un sourire de mépris.

Pour Étienne, après le scandale de ses amours avec une mendiante, sa journée de prison pour dettes, et l’insuccès de sa tentative commerciale, tous les gens honorables le méprisaient ; ses amis de café eux-mêmes ne le recherchaient plus, et il n’y avait que Camille qui lui tendait toujours la main, et lui prêtait quelquefois un peu d’argent.

Une autre personne aussi ne l’abandonnait pas, bien qu’elle ne le vît plus ; Anna, par l’entremise de sa sœur, chercha plus d’une fois à agir sur son cousin, soit pour lui adresser des remontrances, soit pour lui ouvrir de meilleures voies. Claire se prêtant avec bonté aux désirs de sa sœur, eut de longues et intimes conversations avec Étienne. Malheureusement, ils en vinrent à parler aussi des chagrins de Claire, et, cédant à une curiosité indiscrète et peu digne, plus d’une fois Claire interrogea son cousin sur madame Fonjallaz.

Un soir, étourdi par les vapeurs du souper, Étienne rapporta l’entretien qu’il avait eu avec cette femme dans son atelier, comment elle lui avait dit qu’elle voulait rompre avec Ferdinand et le renvoyer, et jusqu’à ces paroles offensantes « Vous pouvez annoncer à votre cousine que je lui rends son mari. » Il se dégrisa, mais trop tard, en voyant l’expression qui se peignit sur le visage de Claire. Elle compara les époques, et acquit cette certitude que son mari n’était revenu à elle, en effet, que chassé par la Fonjallaz, et que cette tristesse qui l’avait touchée n’avait été chez Ferdinand que le poignant regret de ses amours adultères.

Ce fut un coup mortel, sous lequel succombèrent ses dernières illusions. Les premières convulsions de sa