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UN DIVORCE

core assez d’argent pour qu’on pût acheter aisément toute la Suisse, si l’on voulait.

— Eh ! riposta le fermier, on pourrait voir. Vous n’auriez qu’à apporter votre argent, et l’on vous donnerait du plomb en retour.

Une salve de rires patriotiques accueillit cette plaisanterie, et M. Grandvaux dit, en secouant la main du fermier :

— Vous êtes un fameux farceur, allez.

Puis il fit entrer dans la maison ses visiteurs.

Quand Giromey se vit seul, une grimace de mécontentement succéda sur son visage à l’épanouissement du succès, et, tout en grommelant : « Vieux ladre ! » il s’éloigna d’un pas traînant.

— Nous descendrons à la cave tout de même, n’est-ce pas ? dit M. Grandvaux à ses hôtes, aussitôt qu’ils furent entrés. C’est à cause de ce fainéant de Giromey que je disais ça, parce qu’il aurait voulu descendre avec nous ; ça ne demande qu’à boire tout le jour sans travailler. Un homme qui a sa pleine maison d’enfants ! Eh ! mon Père ! que pensent donc les gens ? Moi qui suis vieux, je ne peux pourtant pas comprendre comment on reste sans rien faire. Nous allons descendre, n’est-ce pas !

— Comme il vous plaira, dit Ferdinand. J’étais venu vous dire un mot de la part de Dubreuil…

— Moi, dit Camille, en qualité de Français, je vous demanderai la permission d’aller plutôt faire un croquis dans vos bois, ou de tenir compagnie à mademoiselle Anna.

— À votre volonté, mon cher monsieur. Mais, voyez-vous, la petite a son ouvrage ; nous travaillons tous dans la maison. Allez donc dans le bois, puisque ça vous fait plaisir.