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UN DIVORCE

— Le diable m’emporte, s’écria-t-il, si je n’ai pas votre affaire !

— Vraiment ! dit Étienne, qui, pendant toute cette mimique, faisait assez niaise figure.

— Mon cher, ce n’est pas pour m’en faire un mérite, mais c’est uniquement parce que c’est vous. Je pensais à quelqu’un qui eût été simplement un employé à mes gages ; bien entendu que ce n’est pas cela que je vous proposerai. Il m’en reviendra moins de bénéfices, mais j’aurai le bonheur d’avoir obligé un ami.

Ils se serrèrent la main avec un attendrissement, qui, chez Monadier, touchait presque aux larmes. Étienne attendait toujours.

— Mon très-cher, c’est toute une histoire : bah ! je crois que ces choses-là n’arrivent qu’à moi. Figurez-vous un pauvre diable de Bâlois de ma connaissance qui a découvert… devinez quoi ?…

— Je ne sais, dit Étienne, impatient et inquiet. J’espère que ce ne sont pas vos mines d’anthracite ?

— Nos mines ! Ah ! fichtre ! je voudrais bien pouvoir vous y placer, dans nos mines ; mais il vous faudrait des fonds. Ah ! mon ami, en voilà une affaire absorbante ! je compte qu’elle me donnera la fortune ; mais elle m’aura d’abord donné bien des embarras. Non, ce n’est pas cela. C’est moins et c’est mieux, parce que c’est tout simple, tout bête, tout facile, et que ça va comme sur des roulettes, moyennant… Eh bien, mon cher, en deux mots, il s’agit d’un cirage magnifique, fait avec les matières les moins onéreuses, revenant tout au plus à un centime la livre et dépassant de cent coudées le cirage Jacquand. J’en ai un flacon ; vous le verrez. Il y a aussi un vernis de toute beauté. Nous prenons un local. Nous avons d’abord un ouvrier, puis deux, puis trois, successivement,