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UN DIVORCE

ne le touchent plus. Tu as raison, il aura peur du scandale, il n’osera pas. Peut-être tient-il encore à moi, malgré tout ? Il ne voudra pas rester seul ; car, en partant, j’emporterais tout avec moi.

Son enfant ! il en parlait pourtant avec joie ! Comment a-t-il pu nous trahir tous deux ? Hélas ! il nous a frappés tous les deux ensemble. Toutes mes douleurs, l’enfant les a ressenties. Chaque fois que j’ai souffert, il a souffert aussi. Quelquefois, à force de pleurer, ma tête devenait douloureuse, et je sentais dans mes entrailles d’énervantes douleurs. Alors, à cause de l’enfant, j’ai cherché à me distraire, j’ai fait ce que j’ai pu… Mais à présent…

— Et s’il refusait ? s’écria-t-elle tout à coup, les yeux agrandis par la terreur, s’il refusait ? dis ?

— Eh bien, tu accomplirais ta menace.

— Mais alors ce serait fini, fini pour toujours ! Y penses-tu, Mathilde ?

— Tu vivrais digne et tranquille dans la maison de ton père, où tu élèverais ton enfant loin des insultes et des angoisses que te fait subir cet homme. Claire, je te l’assure, passé de certaines limites, la douceur et la patience sont des lâchetés. Tu as été élevée dans l’idéal de la soumission. Si tu cèdes aujourd’hui, unie à cet homme brutal et corrompu, tu es perdue. De concession en concession, tu descendras… bien bas.

— Oh ! ma tête se fend, dit la pauvre Claire en prenant son front à deux mains. Partir ! être veuve !… Toute la vie… seule, sans amour !…

— Est-ce de l’amour qu’il te donne ?

— Mais j’y pense, d’ailleurs, non, c’est impossible, la loi s’y oppose ; Ferdinand se rirait de moi. Ne sais-tu pas, Mathilde, qu’un mari a le droit de forcer sa femme