Page:Léo - Un divorce, 1866.pdf/117

Cette page a été validée par deux contributeurs.
105
UN DIVORCE

sommes faibles, nous aimons le bien et faisons le mal. Je vous avais bien dit, miss Mathilde, que ce jeune Français était un homme de cœur, mais peu sérieux.

— Ah ! dit Mathilde, et comment le saviez-vous ? Pourquoi me dites-vous cela ?

— Je l’ai pénétré, répondit sir John en rougissant.

La jeune fille continua d’attacher sur lui son regard perçant et soupçonneux.

— En Angleterre, miss, nous sommes plus sincères, plus sérieux et plus pratiques. Là, si vous consentiez à nous suivre, vous seriez mieux appréciée… et naturellement plus heureuse.

— Je n’ai aucun penchant à me défier de vous, monsieur, dit Mathilde, et je n’accueille point aisément des soupçons vulgaires. Mais, — ses traits prirent une expression de hauteur extrême, — je ne puis m’expliquer la cause de l’intérêt si vif que vous me portez ; sachez que je suis trop fière pour accepter de vous, ni d’aucun autre, rien qui ressemble à un bienfait.

Le trouble de sir John était devenu pénible. Il répondit en phrases entrecoupées :

— J’aime beaucoup à causer avec vous, miss… Mes enfants reçoivent de vous de bonnes, très-bonnes leçons, fermes… sans préjugés… il est donc tout naturel… extrêmement simple… très-explicable… car c’est mon intérêt de vous garder avec moi.

— Et de me marier en me dotant de 50,000 francs ! demanda la jeune fille en fixant sur M. Schirling, qui pâlit, des yeux étincelants et sévères.

— Qui vous a dit ?… balbutia-t-il.

M. Smith lui-même, monsieur. Il me l’a dit comme dernier argument pour me décider à être sa femme, ajou-