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de cette nature aussi sereine, de cette verdure aussi fraîche, de ce jour aussi beau que le jour d’autrefois, elle éprouva une émotion étrange.

C’était bien le 20 juin ; c’était bien ce jour… Mais elle, on ne l’aurait plus reconnue, et surtout elle-même ne se reconnaissait plus. La Marinette d’il y a dix ans avait l’âme aussi claire que ce beau jour ; elle se trouvait en harmonie avec toutes ces choses. Elle était bien plus changée par ses fautes qu’elle ne l’eût été par de longs malheurs. Le malheur passe sur l’homme ; la faute reste en lui et, de toutes les épreuves, c’est la plus profonde.

Elle montait, s’approchant du pylone, à l’ombre duquel, autrefois, ils s’étaient assis. L’ombre était à la même place, et, dans cette ombre… un cri faillit lui échapper.

Quatre personnes, assises sur l’herbe, prenaient un repas. Marie eut une hallucination ; elle revit la mère Cadron, la voisine, elle-même et Joseph ; c’étaient bien eux !… Elle se remit cependant, passa la main sur ses yeux et de nouveau regarda.

Cette fois, elle vit trois enfants dont les chapeaux couvraient le visage, et un homme que les yeux de la jeune femme, éblouis par le soleil, ne purent distinguer que vaguement. Fâchée de n’être point seule dans ce lieu, elle s’éloignait, quand une voix argentine vint la frapper au cœur :

— Auguste : disait la petite fille.

— Ô mon Dieu ! C’était Marion qui parlait