Page:Léo - Les Désirs de Marinette.djvu/4

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vieille femme augmenta ma curiosité ; je me déclarai donc prêt à l’écouter, et lui offris une pièce d’argent qu’elle prit avec beaucoup de reconnaissance, car elle eût volontiers parlé pour rien. Elle se mit donc à me raconter l’histoire de Marinette, et la voici :

Marinette, à l’âge de douze ans, était une de ces petites filles qu’on rencontre dans les quartiers les plus pauvres de Paris, les cheveux épars, la jupe et guenilles, les pieds nus dans des souliers déchirés et trop grands.

Elle habitait au bout de la rue de la Santé, près de la Glacière, une petite chambre sans air et sans jour, dans une cour empuantée par l’égout d’un fumier. Son père, autrefois cordonnier, ne faisait plus que des raccommodages, faute du cuir nécessaire à la confection de souliers entiers, et pour dire toute la vérité, il savait mieux lever le coude que pousser l’alène. Marinette avait perdu sa mère dès l’âge de cinq ans ; elle s’ennuyait seule à la maison et n’avait personne qui s’occupât d’elle : aussi jouait-elle toute la journée en compagnie d’autres petites filles, dans le champ couvert de poussier de mottes qui est en face ; quelquefois s’écartant un peu plus loin vers la carrière et sur l’aqueduc, elles se roulaient, avec des éclats de rire, du haut en bas du talus gazonné qui se trouve là.

Marinette, parmi elles, était la plus folle et la plus sauvage. Elle avait d’ailleurs en tout l’initiative, qu’il s’agit de grimper aux arbres ou de former des colliers à plusieurs rangs