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tait à l’aide des aspirations nobles qu’il l’entraînait au mal. Elle ne voulait point faillir ; mais ne pouvait renoncer à lui, car il lui semblait un intermédiaire entre elle et le ciel de l’inconnu. Il était la lumière sans laquelle la vie lui eût semblé froide et ténébreuse. Elle sentait bien pourtant qu’elle entrait dans une voie coupable, mais jusqu’alors elle n’avait exercé ses forces que contre les obstacles extérieurs, jamais contre elle-même. Elle ne sut que pleurer.

Le jardin de la villa était un gracieux fouillis d’arbres et d’arbustes, disposés en massifs, où l’art du jardinier parisien avait fait tous ses efforts pour rendre la ligne courbe et le cercle adéquats à l’infini, mais où l’on ne pouvait s’égarer cependant, à moins d’être aveugle. Les amoureux le sont, à ce qu’on dit ; ils ont du moins cet aveuglement qui consiste à ne voir qu’eux-mêmes. À deux pas de Joseph, presque sous ses yeux, Charles et Marie firent de ce jardinet l’Éden de leur amour, amour contenu encore, mais de plus en plus avide. C’étaient, derrière les massifs, des fleurs échangées, de longs regards, des paroles passionnées, des serrements de main.

Leur instinct les portait à rechercher la solitude à deux, et ils la cherchaient sans voir que Joseph, resté seul avec les enfants, les suivait d’un regard sombre. Sur toutes ces imprudences, le vicomte jetait encore le voile de mille prétextes ; mais la passion de Marie était si naïvement visible, que Joseph n’en put douter.