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fierté révolutionnaire, nous avons foi dans la révolution russe, nous n’irons jamais dans le « souterrain ». Vous irez. La vie des masses, la vie historique est plus forte que toutes vos décisions. Si vous n’y allez pas de votre gré, l’histoire vous y contraindra. Ce furent des gens de l’extrême gauche dont la fraction s’évanouit en fumée au premier revirement de l’histoire. De même qu’alors nous avons su rester révolutionnaires, travailler dans des conditions insupportables et en sortir à nouveau, nous le saurons aussi maintenant, parce que ce n’est pas notre caprice, parce que c’est la réalité inéluctable qui résulte du fait que la révolution européenne osa rester en retard, à l’encontre de nos désirs, et que l’impérialisme allemand, à l’encontre de nos vœux, osa avancer.

Il faut savoir reculer. Aucune phrase ne peut voiler la réalité infiniment amère. Il faut nous dire « Dieu veuille que la retraite se fasse en demi-ordre ». Nous ne pouvons plus reculer en ordre ; Dieu veuille que nous le puissions au moins en demi-ordre, pour gagner un laps de temps, si court qu’il soit, pour que la partie malade de notre organisme puisse se reposer un peu. L’organisme dans son entier est sain, il surmontera la maladie. On ne peut pas exiger qu’il le fasse dans un instant, qu’il arrête l’armée en pleine débandade. Quand je disais à un de nos jeunes amis, qui se disait de gauche : « Camarade, rendez-vous au front, voyez ce qui se fait dans l’armée », il prit cela pour une offense. « On veut nous exiler pour que nous ne puissions faire ici de propagande pour les grands principes de la guerre révolutionnaire ! » Proposant cela je ne pensais vraiment pas à exiler des fractionnaires hostiles, je leur proposais simplement de se rendre compte personnellement que l’armée se débande de façon inouïe. Nous le savions auparavant, nous ne pouvions fermer les yeux sur le fait que la décomposition avait atteint un degré inouï : on en était au point que nos soldats vendaient leurs canons aux Allemands pour quelques sous. Nous savions cela, ainsi que l’impossibilité d’y remédier. La formule « l’Allemand n’avancera point » était donc une aventure des plus risquées. Les défaites les plus lourdes nous