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n’avons rien à leur apprendre. Il faut les exproprier — qu’à cela ne tienne, nous avons prouvé suffisamment que c’était facile ! A toute délégation ouvrière qui venait se plaindre que son usine s’arrêtait, je posais la question : voulez-vous que nous confisquions l’usine ? C’est bien, nous avons des formulaires de décrets tout prêts, je vous en signerai un à ce moment même. Mais dites-le moi, saurez-vous prendre la production entre vos mains ? avez-vous calculé combien vous produisez ? connaissez-vous les rapports de votre production avec le marché russe et le marché mondial ? Et voilà qu’il se fait qu’ils n’ont rien appris là-dessus ; rien n’est écrit de tout cela dans les livres bolchévistes, rien n’est dit non plus dans les écrits des menchéviks. Ce sont les ouvriers des industries où le capitalisme d’État est pratiqué qui savent le mieux répondre à ces questions : les ouvriers du cuir, du textile, du sucre ; ils connaissent leur production, l’apprécient en prolétaires conscients, veulent la conserver, l’augmenter, la développer. Ils disent : seuls, nous ne viendrons pas à bout de cette tâche ; laissons venir les capitalistes, donnons-leur un tiers des places et nous apprendrons d’eux ce qu’il nous faut.

Quand je lis chez les communistes de gauche des phrases ironiques : on ne peut encore savoir qui des deux saura utiliser l’autre (l’ouvrier ou le capitaliste), leur manque de prévision m’étonne vraiment. Certes, si l’on peut encore douter— après la prise du pouvoir, en octobre, après la campagne contre la bourgeoisie, d’octobre à avril, qui des deux saura utiliser l’autre, si c’est l’ouvrier qui utilisera l’organisateur des trusts, ou le profiteur, l’affairiste qui utilisera les ouvriers — alors nous n’avons qu’à plier bagages et à décamper, laissant notre place aux Milioukovs et aux Martovs. Mais ce n’est pas le fait. Aucun ouvrier conscient ne vous croira, et ces craintes sont ridicules sous le régime de la dictature des travailleurs.

A ceux qui critiquaient l’idée d’une discipline de travail, Lénine répondait que ces critiques le faisaient douter du succès de la Révolution.