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L’HEUREUX BERGER

lui. Il ne pensait guère à elle ; il était heureux, et les gens heureux ne meurent pas volontiers.

Il reçut mal la mort, elle insista ; il l’envoya dans son sac.

— Lâche-moi, disait-elle ; je promets de t’épargner.

Mais il ne le laissa point attendrir. On vit alors un étrange spectacle : personne ne mourait plus ; les gens et les bêtes pullulaient comme la mousse dans les bois. Tout le monde se demandait ce que la mort était devenue. Puis arriva une grande famine : les hommes dépérissaient sans mourir. Le berger eut pitié de cette misère ; il laissa partir la mort, après lui avoir fait jurer qu’elle ne songerait jamais à lui.

Il vécut longtemps encore, sans nul souci. À la fin, la vie l’ennuya ; il se résolut à partir pour le ciel.

Il marcha longtemps et finit par arriver à la porte du paradis.

Il frappa. Saint Pierre parut.

— Qui es-tu, voyageur ? demanda par le guichet le porte-clefs céleste.

— Un brave homme. Laisse-moi entrer ici.