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Cuillers du dix-septième siècle, faites à la main. Cuiller à potage fondue et ciselée.
(Collection Henri Vonithel. Musée centennal.

Jusqu’au milieu du dix-huitième siècle, les couverts d’argent étaient forgés à la main. Sur un flan de forme rudimentaire découpé dans un lingot d’argent laminé, l’orfèvre dégrossissait sur l’enclume les formes du couvert. La spatule s’élargissait, le cuilleron s’amincissait, le manche s’allongeait sous l’effort répété du marteau, et, grâce à l’habileté de l’ouvrier, devenait en quelques minutes la silhouette à plat de la cuiller et de la fourchette ; puis la boulerolle en acier servait à enfoncer le culeron, le marteau de bois à donner le cambre. La lime et le poli achevaient le travail, si le couvert devait rester uni ; mais, le plus ordinairement, cette forme unie était destinée à recevoir ou des filets ou des ornements. Les filets se reprenaient au rifloir, et les ornements s’estampaient à la masse dans des matrices de petite dimension, les unes pour la spatule, les autres pour le bouton, comme celles qu’employaient les monétaires pour la fabrication des monnaies et des médailles, alors qu’on ignorait encore l’emploi du balancier.

Le Cabinet des estampes conserve un petit volume daté de 1574, d’Hartmann Schopper, qui nous montre un monnayeur frappant une pièce de monnaie. D’une main, il tient le poinçon portant à sa base la gravure en creux de l’effigie à reproduire : de l’autre, une masse avec laquelle il frappe sur le coin qui va imprimer le relief du flan placé sur l’enclume.

C’est ainsi que procédaient les orfèvres cuilleristes. C’est ainsi qu’ont dû être faites les deux cuillers datant du milieu du dix-septième siècle, dont l’une est à spatule trilobée, et porte un bouton de revers en fer de lance dont le caractère de simplicité