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ciations officielles. Et puis, si cette intervention aboutit, celui qui l’aura réclamée en bénéficiera…

— Une lettre du front du capitaine L… Il a fait décimer une compagnie qui fuyait. Oh ! la double horreur de ces hommes fusillés par des Français.

— Tous les députés sont en civil. C’est une grave question qu’on a débattue au Conseil. Voyait-on un lieutenant interpeller le ministre de la Guerre ? Cette hypothèse sacrilège a suffi pour régler le débat. Le veston a triomphé.

— Le député Painlevé me dit l’extrême résistance des bureaux de la Guerre, qui ne veulent pas se croire en guerre. Et la répugnance aux inventions civiles, les lenteurs incroyables pour améliorer le matériel (quatre mois, juillet-novembre, pour répondre sur une modification d’affût au canon de marine de 16, afin d’en faire une arme de siège). Et de même pour les grenades, les armes à courte portée, que réclament les malheureux dans les tranchées. Partout la même lenteur. Ces professionnels veulent avant tout accaparer les questions. Il y a un artilleur qui étudie une catapulte, comme chez les romains.

— Le professeur Widal raconte sa visite à la Marne. L’armée de Paris n’avait pas de service d’arrière, ce qui explique les morts laissés sur le terrain. Tous étaient noirs et gonflés. Des Sénégalais géants. Le docteur R…, qui l’accompagnait, ne put se décider à enlever les médailles d’identité. De retour à Paris, les deux médecins étaient imprégnés d’une telle odeur de cadavre qu’ils disaient au garçon de restaurant que chaque plat sentait mauvais.

— Quel regret de ne pas pouvoir publier la vraie chronique des tranchées. Un jour, on s’interpelle, front à front : « Il ne vient donc pas vous voir,