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l’Est. Il décrit les deux tranchées. L’allemande n’a qu’une issue, gardée par un sous-officier, revolver au poing. La française est libre. Il y a promiscuité des officiers et des soldats. Des hommes viennent se plaindre de la poste militaire à Millerand. Le général Dubail répond à l’un d’eux : « Voyons, crois-tu que le gouvernement n’ait pas autre chose à faire que de te chiper ton mandat ? Retourne à ton affaire. »

Ces hommes seraient joyeux comme des gosses. Ils sont en partie de plaisir. Quant au G. Q. G. c’est un bureau. On se croirait aux manœuvres. Ces officiers jouent une partie. C’est un match de boxe. Bien joué. Mal joué. Ils observent les règles.

D’accord avec Joffre et Sarrail, Briand a voulu télégraphier qu’il a visité un fort de Verdun en bon état. On suspend néanmoins sa dépêche.

— Sarraut, ministre de l’Instruction publique, qui est méridional, s’enquiert auprès de Joffre et de Sarrail, méridionaux, de la conduite des méridionaux au feu. Et chacun fait : « Ah ! dame… »

— Briand signale le danger des commandants de région qui profitent de leur pouvoir dictatorial pour donner une tournure cléricale à cette dictature. Et cela sur une population affaiblie et éprouvée.

— Ce fut en surprise qu’on amena Briand dans une des communes alsaciennes occupées par nos troupes. L’auto s’arrêta devant une mairie naguère allemande et une sonnerie de clairon éclata. On dit à Briand : « Vous êtes en Alsace. » Briand dit : « C’est rigolo. » C’est son mot chaque fois qu’il est ému.

Quand on lui parle des effroyables pertes en hommes, Briand dit : « Que voulez-vous ?… » Il espère encore une ère de paix pour les générations futures.

— Briand raconte qu’à Épernay chaque officier allemand avait entre ses jambes sa bouteille de