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que toute autre. On pourrait dire : « Je ne crois pas en Dieu. » On ne peut pas dire : « Je ne crois pas en la patrie. » C’est un culte qu’on ne peut pas ne pas pratiquer. Cela rappelle le régime des suspects, cette tache sur la Révolution. Mais puisqu’on aime si ardemment sa patrie en guerre, que ne garde-t-on un peu de cet amour pour le temps de paix, où on ne fait rien pour elle ?

— C… se demande pourquoi les Allemands ont déchaîné la guerre, étant donné leur état florissant et les risques encourus. (On répond : ils surproduisaient, ils couraient à la faillite.)

— Un ivrogne engueule un chauffeur. Il vomit crescendo toutes les injures et finit par « mauvais Français ». Évidemment, c’est le pire, dans l’exaltation religieuse du sentiment patriotique.

— J’entends recommander comme interprète un officier dont le frère a été tué. La personne qui le patronne croit devoir ajouter : « Il y a autant de danger dans ce poste qu’ailleurs, sans quoi je ne le demanderais pas. » C’est un sentiment qu’il est nécessaire d’exprimer.

— Le prince de Monaco, qui était fort bien avec le kaiser, aurait été invité par les Allemands à verser 500.000 francs pour éviter le pillage de son château de Marchais.

— Il y a des fonctionnaires, comme les postiers, qui avaient des instructions contradictoires pour le cas de guerre. Les anciennes disaient de faire le désert devant l’ennemi. Les nouvelles de rester pendant l’occupation allemande. Lesquelles suivre ?

Mme Guillaumet était à Orléans voir un de ses fils malade à l’hôpital militaire, au moment de la mobilisation. Ce fut d’abord une stupeur. Les hommes abandonnèrent la soupe. Les cuillers