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voix et par conséquent sa présence. Pauvre grand Anatole France… Est-il donc repris par ces gens-là ? S’associerait-il à ceux qui veulent une « paix dure, pour qu’elle soit durable » ? Ils ne se rendent donc pas compte que nul ne sait quelle sera la durée de la paix, à quelque moment qu’elle soit faite ?

— Dans l’Illustration, un dessin : un jeune civil souffreteux, assis sur un banc, regarde passer trois blessés, dont un amputé, qui pètent de joie. Il regrette de ne pas être à leur place. Cela s’appelle : l’Envie. J’ai connu l’auteur de ce dessin quand il illustrait mes romans. C’était un anarchiste espagnol, à idées d’avant-garde.

— Le colonel M… s’extasie sur la lucidité, la vivacité d’esprit de Joffre. Castelnau est un aigle. À un déjeuner chez Painlevé, M… n’est pas loin de faire partager à son hôte ces sentiments de vénération.

— Dans les quartiers populeux, le nombre va croissant de femmes qui donnent un remplaçant à leur mari.

— Parmi les ignobles sentiments développés par la guerre, il y a la basse et cruelle envie : tout un village se félicite, parce qu’un mobilisé, instructeur à Versailles, part pour le front. On dit, en parlant de ses parents : « Enfin ! Ceux-là aussi vont pleurer. »

— Les bijoutiers n’ont jamais fait tant d’affaires. On recherche fort les bijoux de platine (9.000 francs le kilo).

— La femme du général K… déplore que son fils soit employé comme garde des forêts à reboiser la région de Verdun. Pourtant il a eu la croix de guerre en Artois. Cette femme vit dans le miracle. Elle attend la jonction des Français et des Russes à Berlin.