la Censure, promet des sanctions, s’échauffe et noie la Commission sous des flots d’éloquence.
Accambray croit que la Censure a fléchi devant la puissance d’un grand journal et que Briand n’est pas fâché qu’elle ait laissé passer.
Il me dit qu’en somme on fait commander par ceux qui ne commandent pas (Pétain) et que ceux qui commandent (Joffre) ne commandent pas.
— Exemple de fièvre obsidionale, de mentalité à l’envers. B…, ancien polytechnicien, a fait sa carrière au ministère de l’Intérieur. J’ai connu chez lui Léon Bourgeois, Sarrieu, le directeur du Matin Poidatz. Il a de la fortune, un fils unique au front. Il est ingénieux et artiste. Imaginant que les sous-marins allemands posent des torpilles en chapelet, il rédige une brochure et l’adresse aux armateurs pour en obtenir des confirmations. Là-dessus, depuis le Temps jusqu’à l’Action Française, un déchaînement d’odieux soupçons : « Cet homme a voulu innocenter les sous-marins boches. Il a eu des informations qui ne viennent pas des journaux… » Vainement il répond qu’il aggrave au contraire le cas desdits sous-marins, qui deviennent ainsi responsables même des torpillages où ils n’apparurent pas. Vainement il énumère la source de chacune de ses informations, toutes puisées dans la presse. Vainement il est pathétique, il crie son indignation d’honnête homme. La passion politique aidant (car il est fonctionnaire), il est submergé sous des flots d’injustice et de folie.
— Pierre Loti se croit encore victime des militaires. Il était avec Pétain. Il reçoit l’ordre, signé Joffre, de se mettre à la disposition du ministre. Alors, il met en branle ses collègues académiciens, Poincaré, Deschanel, il envoie deux fois l’un de ses amis chez Briand, pour savoir d’où vient cette sèche