où, sous le couvert de l’étiquette professionnelle, les orateurs demandent la paix, proclament que ce n’est pas une guerre d’agression de l’Allemagne, que les ouvriers et les paysans se font tuer pour une poignée de gens, etc. Les anarchistes surtout s’agitent.
La Confédération générale du Travail est scindée. La majorité adhère à la guerre, avec Jouhaux. Une minorité se rebelle, dirigée par Merrheim, un homme intéressant, qui fera parler de lui.
On me montre une lettre qui demande la paix et signée au nom d’un groupe ouvrier. Elle est adressée à Poincaré qui l’a annotée d’une écriture émue : « Voir si la signature est authentique. »
En résumé, il existe une vive tension que contiennent les allocations. Une agitation, fondée sur la vie chère, a avorté. Il suffisait d’un accident, comme un raid meurtrier de zeppelins, pour déchaîner l’émeute. D’autant qu’au pôle opposé, l’Action Française cherche à troubler l’opinion avec la hantise de l’espionnage allemand. Les deux courants pourraient se confondre sous une même bannière : « trahison ».
On me signale un nombre important de condamnations capitales pour espionnage. Un grec fut dénoncé par sa maîtresse, animée d’un pur patriotisme. Elle consentit cependant, après un premier refus, à recevoir quelque argent. Ce sont surtout les neutres qui espionnent à Paris.
À propos des évacués : leur déception vient de ce qu’ils s’imaginaient être apothéosés en France et y vivre une vie magnifique. Il y a, dans ces rapatriés, des éléments suspects, beaucoup de femmes qui ont eu des rapports avec des Allemands et qu’on doit surveiller. Tout ce monde se dénonce d’ailleurs mutuellement.
— Je lis Les Amitiés françaises, de Barrès, pour