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AOUT-SEPTEMBRE 1914

s’échapper, aida fort honnêtement au déménagement.

Il peint le Conseil des ministres, se plaint des bavardages. « Nous sommes là trois heures à palabrer sans prendre de décisions… » Et il ajoute : « Heureusement ! »

Il prétend que le ministre Messimy (remplacé le 26 août par Millerand à la Guerre) avait mis sous ses yeux le buste de Marceau dont il s’efforçait d’imiter le calme.

— Je retrouve à Bordeaux un ami ancien, C… Sur la guerre elle-même, il estime que nous aurions dû être plus forts ou plus concluants. Dans les circonstances présentes, il fallait l’éviter. Il s’imagine que ceux qui ont préparé, excité l’état d’esprit qui lui-même prépara la guerre, il s’imagine que ceux-là sont poursuivis de remords !

C… vit le champ de bataille de la Marne peu après que les Allemands l’eurent abandonné. Excursion très suivie. Il dit les deux cents hommes fauchés dans l’attitude de la charge — les porte-monnaie éventrés, cependant — d’autres, atteints au ventre, ont ouvert leur culotte d’un geste instinctif. Tous sont noirs, la tête comme des citrouilles, pareils à de gigantesques sénégalais. Sur le tableau noir d’une école qui fut une ambulance allemande, il lut, parmi des éclaboussures de sang : « La politesse est le premier devoir… »

Enfin, il m’assure que trois jours avant l’ultimatum serbe, notre consul à Francfort lui écrivait de venir en Allemagne en toute sécurité.

— Chaque fois que je lis un article de journal où l’on exhorte à la victoire, je ne peux m’empêcher de penser que celui qui écrit cela est dans un fauteuil au moment où il crie : « Marchons ! ».

— On nous dit que les soldats ont adopté le « Bou-